mercredi 10 février 2010

Une histoire de couleur

Sur la hiérarchie de la couleur de peau:
La "hiérarchie" de la couleur de peau fait partie du système des castes: le mot sanskrit qui veut dire caste, "varna" signifie littéralement couleur. Les Brahmanes sont censés avoir la peau plus claire que les Dalits (Intouchables). D'autre part, de légères nuances de brun sont considérées comme plus séduisantes qu'une peau noire - il suffit de jeter un coup d'oeil aux pages matrimoniales d'un journal indien pour se rendre compte qu'une peau claire est souvent le préalable nécessaire à une prétendante au mariage.

Sur les Blanches en Inde:
Une "gori" est par définition une femme à la peau blanche mais c'est aussi par ce nom qu'on caractérise les "firangi", c'est-à-dire les occidentales qui ont la très bonne idée de se promener en Inde.
Là, ça devient complexe pour tout le monde. Certes, la peau blanche attire et est un signe de beauté (quel homme en Inde ne rêve pas d'épouser une fille à la peau blanche?).

Imaginez une pub où celui qui a la peau blanche aurait clairement plus de chances de draguer et inversement où une femme à la peau blanche aurait plus de chances dans sa vie professionnelle et même la quasi -certitude de faire un beau mariage si elle a la peau blanche....impensable en France...mais vu en Inde délibérément.
Il était une fois une jeune fille malheureuse, au chômage, rejetée par son père. Mais un beau jour, elle essaie une crème qui lui blanchit la peau. Soudain belle et radieuse, elle trouve un emploi et gagne la fierté de son père… Ce conte de fée moderne est raconté par la publicité télévisée de la crème "Fair and lovely" d'Hindustan Level Limited (HLL), géant indien des cosmétiques. Le message marketing des produits blanchissants est toujours le même : la blancheur apporte amour, gloire et beauté.
Attention c'est kitch!
Une autre où la fille se fait grosso modo traiter de banane: lien

On voit ce genre de pubs en permanence à la télé et des rangées interminables de produits éclaircissants sur les étagères des pharmacies.

Et cette photo "marrante":


Le gros souci, c'est que la "firangi " (l'étrangère) est par définition une 'hors-caste' et qu'en plus, elle évoque avec elle toute cette culture occidentale dégradante (je vous passe les détails)
En règle générale, être une "gori" en Inde n'est pas de tout repos, et ce n'est pas peu dire....à moins que vous aimiez être au centre de l'attention et que vous soyez suffisamment forte pour garder la tête haute en cas d'incidents malpropres.


J'arrête là sur les éventuels problèmes rencontrés par les étrangères en Inde sinon ma chère maman est capable de prendre l'avion pour m'enfermer dans ma chambre et m'empêcher d'aller vadrouiller toute seule dans 3 semaines.

Sur les Noirs en Inde:
Il n'est pas inhabituel pour les voyageurs noirs de rencontrer des manifestations de racisme absolu en Inde. Parlez à des étudiants africains en Inde, et vous entendrez souvent parler d'attitudes racistes à leur égard, qui vont de l'insulte au refus de les laisser entrer dans certaines boites et certains restaurants.
(Lonely Planet)

Il y a deux groupes de la population de l'Inde qu'on peut qualifié de "noirs" :
- les Dravidiens qui sont majoritaires dans le Sud du pays. Ils sont les habitants d'origine de l'Inde. Les Aryens (Indo-européens) les ont repoussés vers le sud. Certains de ces Dravidiens se sont par la suite établi au Sri-Lanka.Certains historiens soutiennent qu'ils seraient apparentés aux Noirs d'Afrique, mais cette thèse est loin de faire l'unanimité
- Peu nombreux, les populations indigènes des îles Andamans seraient les descendants des premiers hommes ayant quitté l'Afrique ! Mais difficile de savoir... On les appelle "Negritos", ils sont aujourd'hui minoritaires dans leur archipel.


Ensuite ça devient carrément plus glauque:
Runoko Rashidi, un historien américain, a pu dénombrer en Asie du Sud, une population noire s’élevant à environ 300 millions d’âmes. Il nous fait découvrir les Dalits (les Intouchables) en Inde, en démontrant qu’ils sont en fait d’origine africaine. Or, tout le monde s’est toujours cantonné à parler de la société indienne faite de castes, sans toutefois indiquer que la plupart des intouchables sont des noirs. Ce sont des aborigènes émancipés qui se sont installés dans des agglomérations près des grandes villes. Ces derniers sont nommés Adivasis.
Les autres Adivasis, comme leurs cousins aborigènes d’Australie, sont restés loin des cités, préférant être dans leurs villages et/ou réserves. Ce peuple constitue une grande minorité de la population indienne et par conséquent, devrait bénéficier de la protection des autorités. Officiellement reconnus par la Constitution indienne comme "tribus", ils sont souvent inclus de facto pourtant, dans les « castes », surtout dans la catégorie la plus basse. Cette hiérarchisation de la société et ce classement minent l’émancipation de ces derniers. Les promesses des avantages dont ils doivent en principe bénéficier en vertu du principe de la discrimination positive sont inexistants. Les autres Indiens n’hésitent donc pas à les considérer comme des autochtones primitifs, des sauvages voire des animaux.
Les « sauvages » donc, sans cache-sexe, pieds nus certes, accompagnés de leurs épouses, enfants et amis, se sont déplacés en ville pour faire valoir leurs droits. Manque de pot. D’abord, les autorités ont refusé de les recevoir. Ensuite, ces dernières ont décidé de les offrir en sacrifice, à la vindicte populaire, à une population avide de sensations fortes et morbides. Lâchés, face à une populace assoiffée de haine, les proies faciles -les Adivasis-, se sont retrouvés en face de sauvages, ceux-là, des vrais, pour qui l’odeur du sang est jubilatoire. "Ils" vous parleront du Darfour ou du Tibet, parce que les Chinois y sont mais jamais de l’Inde qui bafoue les droits humains.

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